LA VIE EST BREVE ET LE DESIR SANS FIN : LAPEYRE PATRICK
Et si on parlait bouquin un peu! Ces derniers temps j’ai pris le temps de Lire! et j’aime bien ça!
Celui ci je l’ai choisi un peu par hasard, enfin presque, il a eu le prix fémina (ben vi je suis influençable je sais!) et je trouvais que le titre était plutôt accrocheur! Du coup hop dans mon sac le bouquin!
Et effectivement j’ai pas mis longtemps à le lire! Parce que oui t’as juste envie de savoir comment ça va se terminer d’ailleurs à la fin, à la page …. Nan je ne vais te raconter la fin ca va… quoique…
La vie est brève est le désir sans fin – Patrick LAPEYRE – POL, 2010 (Folio, 2012) — Prix Femina 2010
C’est qui l’auteur de La vie est brève et le désir sans fin ?
Patrick Lapeyre est enseignant et a publié six livres en 20 ans. Une biographie on ne peut plus succinte, mais une écriture splendide : distante, amusée et triste, mais toujours avec des éclats d’humour. L’ écrivain Patrick Lapeyre a reçu le prix Femina 2010 pour son livre ‘La vie est brève et le désir sans fin’ (P.O.L.), roman à la fois mélancolique et sensuel sur un trio amoureux.
C’est quoi l’histoire ?
La vie est brève et le désir sans fin est un livre sur les affres de l’amour, vues du point de vue masculin. Il met en scène deux hommes, l’un marié, à Paris, l’autre pas, à Londres, tous les deux amoureux de la même femme, assez énigmatique, et qui va de l’un à l’autre. Il y a celui qui hésite, et celui qui attend, tous les deux souffrent. Comment choisir ? Qui choisir ? Ce roman est l’histoire d’une inépuisable et inéluctable souffrance amoureuse plus forte que tout.
Ce que j’en pense
J’ai aimé lire ce livre! Je me suis fait amie avec Louis Blériot (Oui comme l’aviateur!), j’ai suivi tous ses affres, ses doutes, ses questionnements, il est devenu en quelques pages l’homme à suivre!! Louis est un peu perdu, touchant à la fois, compulsif. Il y a aussi Nora (son amante) complètement barré, indépendante, jalouse, excessive, rayonnante, solaire… Une femme complexe quoi! Mais j’ai préféré le personnage de Louis, Nora est trop capricieuse, immature et border line mais l’auteur retranscris très bien leurs émotions, du coup tu peux vraiment t’identifier aux personnages!
Ce livre est teinté de gravité et de grâce, où l’humour, la douceur, le refus de la pesanteur ont autant leur place que la souffrance et le chagrin… je dirais qu’en fait ce n’est ni plus ni moins qu’une énième histoire d’amour (ou d’infidélité ça dépend comment on se place) mais raconter à travers 3 personnages dont 2 complètement fusionnels!!
Le petit plus : vivre cet histoire à travers les yeux et le coeur d’un homme : Louis Blériot, d’habitude on parle toujours des femmes, là ça change et c’est pas ininterressant!
L’écriture est simple, les phrases courtes! T’es dans l’ambiance tout de suite!
Bref t’as juste envie de tout lire même si parfois c’est pas super gai mais y’a des répliques qui m’ont bien fait sourire tellement elles sont justes : par exemple, de Louis et de Nora, s’embrassant « mais très, très légèrement, comme des gens soucieux de ne pas toucher à l’équilibre de la planète » — , ironise avec délicatesse sur les beautés et les complexités du difficile métier de vivre et d’aimer.
Cet auteur sait parler d’amour, de ses douleurs, de ses joies, de ses espoirs et désillusions, de manière très sensible.
Bref je te le conseille! Et toi tu lis quoi en ce moment ?
Extrait du livre
Le soleil sans vent commence à brûler. La voiture blanche est garée légèrement en contrebas de la route, à l’entrée d’un chemin creux bordé d’arbustes et de buissons de fougères.
À l’intérieur de la voiture, un homme aux cheveux hérissés paraît dormir les yeux ouverts, la tempe appuyée contre la vitre. Il a la peau mate, les yeux sombres avec de longs cils très fins pareils à des cils d’enfant.
L’homme s’appelle Blériot, il a quarante et un ans depuis peu, et porte ce jour-là – jour de l’Ascension – une petite cravate en cuir noir et des Converse rouges aux pieds. Pendant que les rares voitures semblent onduler sur la route à cause de la distorsion de la chaleur, il continue à scruter le paysage – les pâtures, les troupeaux qui cherchent l’ombre – aussi immobile sur son siège que s’il comptait mentalement chaque animal. Puis, sans jamais rompre le fil de son attention, il finit par s’extraire de la voiture en esquissant quelques mouvements d’assouplissement et en massant ses reins ankylosés, avant de s’installer jambes croisées sur le capot.
À un moment donné, son téléphone se met à sonner sur la banquette de la voiture, mais il ne bouge pas. On dirait qu’il n’est pas là.
Blériot a acquis ce pouvoir étrange d’être à la fois présent et absent sans entraînement ni travail particulier, uniquement en écoutant par hasard un morceau de piano pendant qu’il observait les volets de ses voisins.
Il s’est rendu compte plus tard que n’importe quel son pouvait très bien faire l’affaire, à condition de fixer un point à mi-distance et de bloquer ses poumons à la manière d’un plongeur en apnée.
C’est exactement ce qu’il fait à cet instant, jusqu’à ce que ses poumons menacent d’éclater et qu’il soit obligé de relâcher sa respiration.
Il se sent d’un seul coup devenir léger, impondérable, tandis que le sang reflue progressivement vers ses extrémités. Il allume alors une cigarette et réalise à cet instant qu’il n’a rien avalé depuis deux jours.
Il roule pendant une trentaine de kilomètres à la recherche d’un restaurant un peu engageant et, de guerre lasse, finit par se garer devant un bâtiment sans étage entouré d’une terrasse en bois et de cinq ou six palmiers poussiéreux. À l’intérieur, l’air est moite, presque statique, malgré les fenêtres ouvertes et le gros ventilateur bleu posé sur le comptoir.
Il n’y a plus grand monde dans la salle à cette heure, hormis un trio de routiers espagnols et un couple exténué qui semble avoir perdu l’envie de se parler. L’air que brasse le ventilateur balaie de bas en haut le visage d’une serveuse affairée derrière le bar, rebroussant ses cheveux blonds.
C’est un jour de début d’été ordinaire, un jour où Blériot, qui n’attend rien ni personne, est en train de calculer en mangeant ses crudités l’heure à laquelle il arrivera en vue des contreforts des Cévennes quand l’indicatif musical de son portable – ça ressemble aux trompettes de la destinée – retentit à nouveau dans le vide de l’après-midi.
Louis, c’est moi, dit aussitôt Nora de sa voix fluette, toute voilée, qu’il reconnaîtrait entre mille, je suis en ce moment à Amiens chez des amis anglais. En principe, j’arrive dans quelques jours à Paris.
À Paris ? fait-il en se levant précipitamment pour aller vers les toilettes, à l’abri des oreilles indiscrètes.
Elle l’appelle d’un café en face de la gare.
Et toi, demanda-t-elle, où tu es ?
Où je suis ? répète-t-il, parce qu’il a l’habitude de penser lentement – si lentement qu’il est en général le dernier à comprendre ce qui se passe dans sa propre vie. Je vais voir mes parents et je suis en train de déjeuner quelque part du côté de Rodez, commence-t-il, avant de se rendre compte – ses lèvres continuent à bouger dans le vide – qu’ils ont été coupés.
Il essaie de rappeler plusieurs fois, mais tombe invariablement sur la même voix enregistrée : Please, leave a message after the bip.
À cet instant, la lumière des toilettes s’éteint et Blériot reste debout dans le noir, son téléphone à la main, sans chercher l’interrupteur ni même tenter d’ouvrir la porte, comme s’il avait besoin de se recueillir dans l’obscurité pour prendre la mesure de ce qui lui arrive.
Car il attendait cet appel depuis deux ans.
Quand il retourne à sa table, il demeure un moment les bras ballants en face de son assiette, sentant comme une légère poussée de fièvre, accompagnée de frissons entre les épaules.
Il y a peut-être des filles qui disparaissent pour avoir un jour le plaisir de revenir, suppose-t-il après coup en cherchant sa serviette.
Il commande alors un autre verre de vin et entreprend de terminer sa viande froide, sans rien laisser paraître, ni quitter cette expression un peu soucieuse dont il déguise habituellement ses réactions.
Alors que les routiers espagnols ont entamé une partie de cartes – derrière lui, le couple en crise n’a toujours pas échangé une parole –, il se tient très droit sur sa chaise, en pleine possession de lui-même, et, à l’exception du léger tremblement de ses mains, rien ne peut laisser soupçonner dans quelle perplexité, dans quel état émotionnel il se trouve depuis cette communication